Nucléaire et démocratie

Benoît Gaillard, secrétaire du Parti socialiste lausannois – paru dans Lausanne Cités le 24 mars 2011

Dans le monde entier, les événements qui se déroulent autour de la centrale nucléaire de Fukushima sont suivis avec attention, mais aussi avec terreur. Les déclarations d’experts se contredisent. Le gouvernement japonais sélectionne les informations. Les Etats pro-nucléaire se rengorgent: même en cas de séisme, cela n’arriverait jamais chez nous. Pendant ce temps en Suisse, des partis jusqu’ici très favorables à l’atome entament des retournements de veste spectaculaires…

Le nucléaire produit des déchets que nous ne savons pas traiter. Il rend possible des pollutions immaitrisables de l’environnement. Cette énergie n’est ni renouvelable, ni neutre en termes de CO2. Ces arguments écologiques sont connus et pertinents.

Mais l’atome menace aussi, à sa façon, la démocratie. En effet, il met dans les mains d’une poignée d’experts le destin de milliers d’hommes et de femmes, et de plus il force à créer des structures si coûteuses que leur rentabilisation s’étend sur des décennies. Pour cette raison, l’énergie atomique ôte aux générations à venir une part de leur droit à décider de leur mode d’alimentation en énergie : on rétorquera toujours, au détriment de la démocratie, qu’il vaut mieux se servir des centrales, puisqu’elles existent…

Plus grave, l’accès à l’information est et sera toujours entravé. Les hiérarchies quasiment militaires qui dirigent les centrales ne laissent filtrer que les informations qui les arrangent. Les experts en mesure de comprendre ces informations semblent, eux,  guidés principalement par des intérêts économiques. La difficulté, pour les Japonais eux-mêmes, à savoir dans quelle mesure ils sont réellement menacés, est une conséquence scandaleuse et atterrante de cet état de fait.

Ces défauts ne sont absolument pas le fait du hasard. Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise gestion du nucléaire. C’est la façon dont fonctionne cette énergie qui engendre ces graves problèmes. Partout où il y a nucléaire, il y a des élites qui évaluent seules le danger et décident des informations à publier ou non – rendant un vrai débat démocratique impossible.

Nous ne voulons pas remplir la planète de déchets infernaux, c’est une évidence. Mais nous ne voulons pas davantage laisser le pouvoir à des élites nucléaires. Nous voulons une société démocratique et des énergies propres. Nous ne voudrons jamais du nucléaire !