Interpellation urgente – Av. Druey 22-30 : après le jugement du Tribunal fédéral, quel avenir pour les locataires rescapés de sept ans de lutte pour leur logement et d’incertitude pour leur avenir ?

Interpellation urgente déposée par Benoît Gaillard, conseiller communal, le 21 mai 2019.

En août 2012, l’ensemble des habitants des immeubles 22 à 30 de l’avenue Druey recevaient la notification de la résiliation de leurs baux, avec un délai inférieur à un an pour quitter leurs logements. Commençait alors une longue bataille en justice pour obtenir que la rénovation prévue se limite à ce qui était réellement nécessaire, et pour permettre aux locataires qui le souhaitaient de conserver leur logement à la fin des travaux. La Ville, soutenue par le Conseil communal (résolution du 25 septembre 2012), était intervenue pour proposer, notamment, des solutions de relogement temporaire pendant le chantier.

Dans ce qui est malheureusement devenu une saga judiciaire, les épisodes ne se comptent plus. Après une première décision du tribunal des baux en 2015, favorable aux locataires, et annulant les résiliations, la cour civile du Tribunal cantonal, après avoir proposé une conciliation refusée par le propriétaire, a statué en 2018 en confirmant la position du propriétaire, tout en étendant à juillet 2019 le délai fixé pour le départ des locataires. Tout récemment, enfin, le Tribunal fédéral a confirmé cette position, sans modifier ce dernier délai, qui est donc extrêmement proche.

En parallèle, il n’a pas fallu moins de trois tentatives pour que le propriétaire obtienne un permis de construire pour son projet, consistant finalement à rénover les appartements sans les transformer (contrairement à son intention initiale), et à réaliser une dizaine de lofts dans les combles. L’autorisation est aujourd’hui en vigueur.

Pendant ces sept années, tout entretien de ces immeubles anciens a été totalement suspendu. Les logements devenant vides du fait des mouvements naturels ont été reloués avec des baux à durée déterminée et des loyers très fortement augmentés à des locataires précaires, peu susceptibles de contester quoi que ce soit. Certains appartements ont été reloués meublés, parfois à la chambre. Certains baux à échéance fixe ont été prolongés jusqu’en mars 2020, ce qui laisse imaginer que les travaux ne démarreront pas cette année.

Dès 2012, les locataires des immeubles de l’av. Druey 22-30 se sont constitué en une association. Ils sont aujourd’hui encore une trentaine, sur les cinquante logements, à avoir subi la procédure et ses aléas depuis ses débuts, et parmi eux se trouvent des familles avec enfants en bas âge, des personnes âgées. Formellement, le jugement rendu par le Tribunal fédéral leur donne, aujourd’hui, moins de deux mois pour organiser leur départ et donc se reloger, alors que la pénurie est encore très forte pour les logements du même type à Lausanne.

Finalement, tout ceci ne dit encore rien de l’immense perte pour la vie du quartier et pour la cohésion sociale que constitue la destruction d’un bloc d’immeubles tel que celui dont il est question. Bien avant les résiliations de 2012, les locataires formaient déjà une petite communauté, diverse et solidaire. Nul doute qu’une politique pour des quartiers vivants et agréables à vivre n’est envisageable qu’en garantissant autant de stabilité que possible, qui rend possible l’établissement de vraies relations sociales.

Face à cette situation humainement inacceptable, il est impératif que la Ville s’engage aux côtés de ses habitants par tous les moyens possibles. Nous posons les questions suivantes à la Municipalité :

  • Quelle est l’appréciation de la Municipalité quant aux rénovations de logements anciens et relevant des catégories à forte pénurie, lorsqu’elles sont assorties de la résiliation de tous les baux ?
  • A quelles conditions précises s’agissant des loyers le permis de construire a-t-il été donné en 2018 ?
  • N’était-il pas possible, en vertu du droit cantonal, d’assortir le permis de construire d’une obligation de ne pas résilier les baux ?
  • La Municipalité va-t-elle mobiliser ses services et le parc de logements dont elle assure la gérance pour faciliter le relogement des locataires forcés de partir ?
  • Quelle appréciation la Municipalité porte-t-elle sur la relocation systématique de logements avec des baux à durée déterminée, parfois meublés, dans ce type de cas ? Ces relocations sont-elles conformes à la nouvelle loi cantonale sur la protection et la préservation du parc locatif (LPPPL) ? Qu’en est-il lorsque ces relocations sont effectuées à la chambre et pas pour les appartements entiers, via une gérance de façade ?
  • La Municipalité peut-elle confirmer que certains baux à durée déterminée ont été prolongés jusqu’en mars 2020 ?
  • Les travaux sont-ils prêts à démarrer immédiatement ? Leur commencement peut-il être retardé ?
  • La Municipalité peut-elle intervenir pour le maintien des locataires dans les logements tant que les travaux ne débutent pas réellement ?
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